LA MALADIE DE CROHN
La maladie de Crohn est l’une des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) avec la rectocolite hémorragique. Elle est liée à une hyperactivité du système immunitaire digestif. De manière générale, les MICI sont partout en augmentation. L’Europe du Nord, de l’Ouest et les Etats-Unis sont les régions du globe où la maladie de Crohn est la plus prévalente. En France, plus de 120 000 personnes en sont atteintes.
La maladie de Crohn est une maladie inflammatoire chronique du tube digestif dont la cause reste inconnue à ce jour.
L’inflammation se traduit par une muqueuse intestinale fragile, inflammatoire (« irritée »), siège d’ulcérations plus ou moins profondes qui peuvent aller jusqu’à la perforation pouvant provoquer des abcès au contact de l’intestin malade voire une péritonite, des fistules (communication entre l’intestin malade et d’autres organes de voisinage comme l’intestin, la vessie ou la peau) ou des rétrécissements inflammatoires du calibre du tube digestif (sténoses).
La maladie de Crohn évolue souvent par des phases d'activité appelées « poussées » totalement imprévisibles et très variables en intensité, entrecoupées de périodes de rémission. Son impact sur la qualité de vie peut être considérable. Lorsque les symptômes de la poussée sont sévères (hémorragie, diarrhées, difficultés d’alimentation, etc.), l’hospitalisation est nécessaire.
Tous les segments du tube digestif sont potentiellement concernés, depuis la bouche jusqu’à l’anus. Le plus souvent, l’iléon et le côlon sont touchés. Dans la moitié des cas, l’anus est atteint (abcès, fissures, fistules anales).
Le tableau clinique est fonction de l’étendue, de la localisation et de l’intensité inflammatoire des lésions, avec de la diarrhée de façon prolongée, parfois sanglante (rectorragies), des douleurs abdominales, un amaigrissement et de la fièvre pouvant être liée à la formation d’un abcès. Une sténose peut être responsable d’une occlusion intestinale.
Les signes proctologiques (suintements, douleurs anales) ne sont pas à négliger.
La maladie de Crohn est aussi à l’origine de signes extra-digestifs telles des douleurs ostéo-articulaires et des manifestations cutanées, avec parfois l’apparition de nodules sous-cutanés inflammatoires (érythème noueux).
La fatigue, l’anorexie sont souvent le lot des malades de Crohn. Elle peut être responsable d’un retard de croissance chez l’enfant.
Qui présente un risque ?
Le tabagisme favorise et aggrave la maladie de Crohn
Les apparentés au premier degré de personnes ayant une maladie de Crohn ont effectivement un surrisque de développer la maladie par rapport au reste de la population, mais qui reste faible. Pour autant, la maladie de Crohn n’est pas une maladie héréditaire, ce qui n’exclut pas une susceptibilité génétique. En effet, certains gènes ont été identifiés comme favorisant l’apparition de la maladie lorsqu’ils sont mutés, à l’exemple du gène CARD15/NOD2 qui multiplie par 4 ou 5 le risque de souffrir de la maladie. 10 % à 25 % des personnes atteintes ont des antécédents familiaux de maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI).
Le tabac joue un rôle majeur car associé à des formes plus graves de la maladie et plus difficiles à traiter. Il expose aussi à des rechutes plus fréquentes et à un surrisque d’opérations chirurgicales.
Aucune étude à ce jour n’a confirmé l’influence du stress ou d’un régime d’exclusion de certains aliments sur le déclenchement de la maladie ou de ses poussées. En revanche, le risque de carences (fer, vitamine D) et de dénutrition est important. Les supplémentations en acides gras oméga-3 et en probiotiques ne sont pas recommandées.
Une modification de la composition du microbiote intestinal (dysbiose) est fréquemment retrouvée dans la maladie de Crohn, sans que l’on sache si elle est une cause ou une conséquence de l’inflammation chronique.
L’augmentation de la perméabilité de la paroi intestinale, laissant passer des fragments bactériens au sein de l’épithélium intestinal, pourrait expliquer l’activation du système immunitaire et, de ce fait, la réaction inflammatoire localisée
Les examens
Les examens endoscopiques et radiologiques cartographient des lésions intestinales
Le diagnostic de maladie de Crohn est établi d’une part au moyen de prises de sang confirmant une inflammation ou une anémie et, d’autre part, par la réalisation d’une endoscopie œso-gastro-duodénale (EOGD) et d’une coloscopie qui permet de visualiser l’inflammation au niveau de la muqueuse intestinale, typiquement des ulcérations superficielles ou profondes.
Le scanner (tomodensitométrie), l’échographie ou une Imagerie par Résonnance Magnétique (IRM) permettent de mieux visualiser l’intestin grêle et peuvent révéler une complication (abcès, perforation, sténose).
Un faisceau d’arguments étaye la piste du processus inflammatoire avec tout d’abord la localisation, l’aspect endoscopique particulier de l’intestin et, dans un tiers des cas, la présence sur les biopsies (prélèvements effectués à l’aide d’un endoscope) de granulomes épithélioides (amas de cellules macrophages, ces globules blancs appartenant au système immunitaire), très évocateurs de la maladie.
Une IRM du périnée peut être utile pour explorer une fistule ou un abcès péri-anal.
Les traitements
L’inflammation sous contrôle
L’arrêt du tabac conditionne la réussite du traitement. Celui-ci ne permet pas de guérir la maladie. Il vise à limiter les poussées, à prévenir les complications, les récidives et en particulier post-opératoires.
La suppression des symptômes est l’objectif principal pour le patient.
La finalité du traitement est d’obtenir la cicatrisation des lésions de la muqueuse intestinale et de faire disparaître l’inflammation.
Plusieurs lignes de traitement existent, dont la corticothérapie. Elle est essentiellement prescrite en cures courtes lors des poussées, avec l’objectif de réduire l’exposition des patients à ses effets indésirables (prise de poids, manifestations cutanées, diabète, ostéoporose).
Les médicaments immunosuppresseurs constitués des thiopurines (azathioprine, 6-mercaptopurine) et du méthotrexate agissent de manière très ciblée sur certains acteurs du système immunitaire afin de calmer les réactions inflammatoires. Ils sont parfois utilisés seuls mais le plus souvent en combinaison avec les biothérapies. Celles-ci sont en majorité des « anticorps monoclonaux » qui modifient la réponse biologique en prenant pour cible des voies de l’inflammation digestive dont la plus connues est le facteur de nécrose tumoral (TNF). Quatre sont commercialisés : les anti-TNF infliximab et adalimumab et, plus récemment, l’ustekinumab, ciblant d’autres acteurs de l’inflammation, prescrit chez les patients réfractaires aux autres thérapeutiques. Un autre anticorps monoclonal, le vedolizumab, module l’immunité spécifiquement au niveau du tube digestif, avec l’avantage de limiter le risque d’infections et d’immunodépression généralisée. Son remboursement est remis en cause depuis 2017 dans la maladie de Crohn.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont à éviter, car ils peuvent provoquer une poussée ou aggraver des lésions intestinales.
Dans la maladie de Crohn, 50 à 70 % des patients devront subir une intervention chirurgicale dans les dix ans. Il s’agit pour le chirurgien de réséquer la partie de l’intestin malade ou de réparer une complication (sténose, fistule).
Malheureusement, la chirurgie n’empêche pas les récidives de la maladie, lesquelles sont presque constantes, dans 90 % des cas, y compris en l’absence de tout symptôme. C’est pourquoi toutes les précautions sont prises pour reséquer uniquement les segments d’intestin malade afin de le préserver au maximum. Dans certains cas, le chirurgien recourt de façon temporaire à une stomie (anus artificiel). Elles sont rarement posées de façon permanente.
LA RECTOCOLITE HEMORRAGIQUE
La rectocolite hémorragique et la maladie de Crohn sont deux maladies intestinales provoquées par l’inflammation chronique des muqueuses. A la différence près que la rectocolite hémorragique affecte exclusivement l'extrémité distale du tube digestif, le rectum et souvent le côlon, en une atteinte inflammatoire continue de la muqueuse.
La rectocolite hémorragique (RCH) est une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) liée à une réaction excessive du système de défense du corps (le système immunitaire). Comme la maladie de Crohn, elle évolue généralement par poussées entrecoupées de phases de rémission complète mais peut progresser parfois de façon continue. La plupart du temps, les lésions sont aggravées par les poussées successives, augmentant le risque de complications.
L’influence de facteurs immunitaires, environnementaux, génétiques ou hormonaux, de la flore intestinale sont évoqués mais à ce jour, la rectocolite hémorragique reste une énigme. Sa cause demeure inconnue, ainsi que les éléments déclencheurs des poussées.
L’inflammation concerne systématiquement le rectum , sur le côlon de façon plus ou moins importante mais ne laissant jamais d’intervalle de muqueuse saine. A contrario, la maladie de Crohn est une atteinte dite « segmentaire » pouvant toucher l’ensemble du tube digestif avec une alternance entre les zones saines et les zones malades.
Le vocabulaire est spécifique de la partie touchée par l’inflammation : le terme de « rectite » est employé lorsque seul le rectum est inflammé puis, en fonction de l’étendue dans le côlon, on aura une « rectocolite gauche » lorsque les lésions restent en-deçà de l’angle gauche du côlon et une « pancolite » lorsque l’inflammation s’étend au-delà. L’anus et l’intestin grêle ne sont jamais atteints.
La rectocolite hémorragique est sévère chez un malade sur dix en cas de pancolite.
Visuellement, une muqueuse inflammée est fragile, semble « irritée » et est le siège d’ulcérations plus ou moins profondes.
Les signes ressentis par le malade dépendent de l’étendue, de la localisation et de l’intensité inflammatoire des lésions. La diarrhée est souvent présente, contenant habituellement des glaires et du sang (rectorragies). La présence de glaires et de sang dans les selles doit être prise très au sérieux.
Une rectite provoque des douleurs rectales (ténesmes), avec l’évacuation de pertes glairo-sanglantes. Elle se traduit par une envie pressante d’aller à la selle ou des faux-besoins, les selles ne contenant pas de matière fécale (« syndrome rectal »).
Dans les formes étendues (pancolites) sévères, la diarrhée importante est souvent sanglante (d’où le terme de rectocolite « hémorragique ») et accompagnée de douleurs, d’un amaigrissement, de fièvre et d’une importante fatigue.
Lorsque les symptômes engendrés par la poussée sont sévères (hémorragie, diarrhée, difficultés d’alimentation, etc.), l’hospitalisation s’impose.
La rectocolite hémorragique est également à l’origine de signes extra-digestifs chez au moins un tiers des malades avec, au premier plan, des douleurs ostéo-articulaires plus ou moins sévères comme le gonflement des articulations atteintes (chevilles, genoux, poignets) et des éruptions cutanées, plus rarement des lésions oculaires (uvéites). L’une de ces manifestations dermatologiques est l’érythème noueux. Ces nodules sous-cutanés inflammatoires se présentent sous la forme de petites masses douloureuses et de couleur violacée. Enfin, moins de 5 malades sur 100 ont une atteinte des voies biliaires.
La qualité de vie d’un malade atteint de rectocolite hémorragique peut être très dégradée et sa souffrance psychologique considérable.
Qui présente un risque ?
Tabac, stress et alimentation sélective…
Le fait qu’un parent au 1er degré souffre d’une rectocolite hémorragique confère un faible surrisque de développer soi-même la maladie. Sans être une maladie héréditaire, certains gènes de susceptibilité semblent favoriser son déclenchement, lorsqu’ils sont mutés. Les formes familiales varient de 5 % à 20 % selon les études.
Au contraire de la maladie de Crohn, le tabac n’a pas d’effet délétère démontré, voire serait protecteur. Mais les conséquences potentielles du tabagisme sur le système cardio-vasculaire et les poumons sont telles que sa poursuite ou sa reprise au cours de la rectocolite hémorragique ne peut pas s'envisager.
Pour sa part, le stress n’influence pas l’apparition de la maladie ni même celle des poussées, mais pourraient néanmoins les aggraver.
De plus, exclure certains aliments de son alimentation semble inutile, d’autant plus risqué que la rectocolite hémorragique expose à un risque de carence en fer. Aucun régime alimentaire n’a fait la preuve d’un effet bénéfique ou bien néfaste sur la rectocolite hémorragique. D’ailleurs, parmi les carences en micronutriments, celles en fer et en vitamine D doivent être systématiquement recherchées et supplémentées. Quant à la supplémentation en oméga-3 pour maintenir la rémission, elle n’est étayée par aucun argument scientifique.
Deux précautions : les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont à éviter, car ils peuvent théoriquement provoquer une poussée ou aggraver des lésions intestinales. Les médicaments anti-diarrhéiques (de type lopéramide) sont à éviter en cas de poussée sévère car ils peuvent augmenter le risque de colectasie (mégacôlon toxique).
Les examens
Seuls les examens endoscopiques confirment le diagnostic
Dans la mesure où aucune atteinte inflammatoire n’est retrouvée en dehors du rectum et du côlon, seule la coloscopie est indiquée. Elle permet de visualiser l’intérieur du rectum ou du côlon grâce à un tube flexible introduit par l’anus et met en évidence une atteinte inflammatoire continue de la muqueuse rectale et/ou colique plus ou moins étendue, et typiquement des ulcérations superficielles ou profondes.
Contrairement à la maladie de Crohn, le prélèvement d'un fragment de muqueuse en vue d'un examen microscopique (biopsie) ne retrouve pas de granulome épithélioïde (amas de macrophages, ces globules blancs appartenant au système immunitaire).
Le diagnostic repose donc un faisceau d’arguments : l’aspect endoscopique de la muqueuse, la localisation des lésions restreintes au rectum et au côlon, une inflammation et une anémie (diminution de la quantité d’hémoglobine dans le sang) confirmées par une prise de sang et l’absence de cause infectieuse d’après un examen des selles.
Dans les formes graves, un scanner peut être indiqué en urgence pour rechercher une colectasie ou une perforation de la paroi de l’intestin ou du rectum.
Les traitements
Stopper l’inflammation permet la cicatrisation des lésions digestives
L’objectif du traitement de la rectocolite hémorragique est d’obtenir la cicatrisation des lésions du point de vue endoscopique et, de ce fait, le soulagement des symptômes.
Les traitements sont guidés par l’étendue et la sévérité de la maladie : alors que les formes basses rectales ou recto-sigmoïdiennes peuvent être traitées par suppositoires ou lavements, les formes plus étendues justifient d’un traitement par voie générale. Mais quelle que soit la voie d’administration, le médicament de première intention au cours des poussées de la maladie, dans les formes légères à modérées, est l’anti-inflammatoire mésalazine (acide 5-aminosalicylique ou 5-ASA), remplacée en cas d’échec par une corticothérapie prescrite sur une durée la plus courte possible (cortisone pendant 3-4 semaines).
Lorsque ces thérapeutiques ne suffisent pas ou lorsque la rectocolite hémorragique est sévère, les médecins disposent d’immunosuppresseurs et d’immunomodulateurs.
L’immunosuppresseur ciclosporine est utilisé en cure courte dans les formes graves, lors des poussées sévères. Les médicaments immunosuppresseurs appelés thiopurines (azathioprine, 6-mercaptopurine) ciblent certains acteurs du système immunitaire afin de calmer les réactions inflammatoires. Ils sont majoritairement associés à des biothérapies. Ces dernières sont en majorité des « anticorps monoclonaux » : infliximab, adalimumab et golimumab, trois molécules appelées des « anti-TNFalpha ». Ils modifient la réponse biologique en prenant pour cible des voies de l’inflammation digestive dont la plus connues est le facteur de nécrose tumoral (TNF). Ces médicaments qui ne sont pas dénués d’effets indésirables ne doivent pas être administrés en cas d’infection évolutive. Un autre anticorps monoclonal, le vedolizumab, module l’immunité spécifiquement au niveau du tube digestif, avec l’avantage de limiter le risque d’infections et d’immunodépression généralisée. Des traitements oraux devraient être prochainement disponibles en cas d’échec des anti-TNFalpha.
En cas d’échec des traitements, il est possible de recourir à une intervention chirurgicale qui consiste en une « procto-colectomie » totale, qui signifie l’ablation à la fois de la totalité du côlon et du rectum. L’intestin grêle est alors connecté à l’anus au moyen d’un montage chirurgical (anastomose iléo-anale), doté d’un réservoir iléal confectionné avec une partie de l’intestin grêle. Le résultat peut être considéré comme satisfaisant si le patient consigne 4 à 5 selles molles par jour et aucune la nuit.
Néanmoins, dans 30 % des cas, l’inflammation peut récidiver et gagner le réservoir (pochite).
Dans le cas des colites aigües graves, les corticoïdes et éventuellement des immunosuppresseurs (ciclosporine ou infliximab) sont injectés par voie intra-veineuse avant d’envisager une colectomie totale en urgence en cas d’échec.
Aujourd’hui, une hémorragie importante, une complication infectieuse suite à la perforation du côlon ou un cancer colorectal sont retrouvés dans les rares décès liés à la rectocolite hémorragique.
Les formes de MICI chez l’enfant
Les MICI (RCH ou MC) se déclarent le plus souvent chez l’adulte jeune, des formes précoces existent et peuvent toucher l’enfant, il ne s’agit plus de maladies exceptionnelles. Le nombre de nouveaux cas dans la maladie de Crohn est passé de 2-3 enfants/100 000 à 5 enfants/100 000.
La maladie débute rarement avant l’âge de 10 ans, bien que l’on observe de rares cas de MICI chez le très jeune enfant.
Garçons et filles sont touchés de façon équivalente. Dans 15 à 35% des cas, un autre membre de la famille est également atteint sans que l’on puisse affirmer qu’il existe une transmission génétique de la maladie. Les MICI sont considérés comme des maladies multigéniques.
On pourrait donc estimer que la composante génétique des MICI de l’enfant serait plus forte que chez l’adulte. Néanmoins en l’état actuel de nos connaissances, il n’est pas possible de retenir l’idée que les MICI de l’enfant sont plus « génétiques » que les MICI de l’adulte. En l’absence de différence génétique, l’hypothèse d’un environnement partagé participant au caractère familial de la maladie est plausible.
Effectivement il n’a pas encore été possible d’identifier une anomalie génétique qui permette d’établir un dépistage des sujets susceptibles de développer la maladie. Contrairement à l’adulte, il existe une prépondérance de garçons pour la MC (environ 60 %) et un sex-ratio proche de 1 pour la RCH.
LES FORMES DE MICI CHEZ L’ENFANT
L’alternance de périodes avec et sans symptômes
Il s’agit d’affections chroniques. Cela ne signifie pas que l’enfant souffrira de la maladie toute sa vie durant. Il y a de longues périodes sans symptômes, avec ou sans traitement, pendant lesquelles la vie est strictement normale.
Cela signifie en revanche qu’un suivi est nécessaire et surtout que la reprise symptomatique de la maladie doit déclencher rapidement une prise en charge adaptée.
Un diagnostic souvent difficile à établir
Dans la maladie de Crohn chez l’enfant, le diagnostic est difficile à établir, car au début les symptômes sont peu nombreux et atypiques. Aussi le diagnostic est le plus souvent porté tardivement et par hasard : par exemple lors d’une intervention chirurgicale comme l’appendicite, ou lors de la découverte d’une complication ou lors d’une altération de l’état général inexpliquée dans un contexte de douleurs abdominales avec diarrhée à répétition.
Dans la rectocolite, le diagnostic est évoqué devant une diarrhée faite de selles glairo-sanglantes. Dans tous les cas, des douleurs abdominales, une diarrhée chronique et un retard staturo- pondéral, doivent faire envisager le diagnostic de MICI.
De plus, il ne faut pas méconnaître les signes associés suivants, qui peuvent être très évocateurs surtout dans la maladie de Crohn, à savoir des lésions de l’anus (abcès, fissure*), des atteintes des articulations ou de la peau.
Des enfants plus petits que les autres
Le retard de croissance est parfois le seul signe de la maladie. Il pose un problème spécifique chez l’enfant. À âge égal, les enfants porteurs de MICI sont souvent plus petits et paraissent plus jeunes que leurs camarades.
Leur puberté est plus tardive. Le retard staturo-pondéral est dû en partie à la baisse de l’appétit volontiers lié aux douleurs abdominales, et en partie à la diarrhée et à la malabsorption intestinale. Heureusement, le traitement permet à ces enfants de rattraper leur retard de croissance. Raison pour laquelle un dépistage et une prise en charge de ces enfants sont essentiels. Cela nécessite une prise en charge nutritionnelle précoce.
Les traitements des MICI chez l’enfant
Les traitements utilisés sont les mêmes que chez l’adulte. Ils permettent de régler les poussées de la maladie en supprimant les symptômes. Ces différents traitements doivent tenir compte chez l’enfant des problèmes de croissance. Le mode et le rythme d’administration des médicaments peuvent être différents chez l’adulte et chez l’enfant.
Ainsi pour respecter la croissance de l’enfant, les corticoïdes* sont prescrits à forte dose sur de courtes périodes ou un jour sur deux en cas de traitement de longue durée. L’utilisation dans certaines formes de MICI de corticoïdes* à faible biodisponibilité ayant donc moins d’effets secondaires peuvent être intéressants chez l’enfant. Les indications aux immunosuppresseurs et biothérapies sont les mêmes que chez l’adulte, à savoir les formes corticodépendantes ou corticorésistantes. Ils peuvent être utilisés plus spécifiquement dans les lésions anales de la maladie de Crohn.
Une spécificité pédiatrique est l’utilisation de l’assistance nutritionnelle, principalement sous forme de nutrition entérale cyclique. Chez l’enfant, plusieurs études et une méta-analyse ont démontré l’efficacité de l’assistance nutritionnelle au même titre que les corticoïdes. La prise en compte des problèmes nutritionnels, dans la maladie de Crohn, est un élément important du traitement. En cas de carence importante, une nutrition par sonde peut être utile. Elle permet une prise de poids, une amélioration spectaculaire de la maladie et aussi de contrôler le problème du retard de croissance. Après une (courte) hospitalisation, une activité normale peut être reprise avec retour à l’école.
Les indications chirurgicales sont peu nombreuses
Une intervention chirurgicale est rarement proposée chez l’enfant. Elle a des indications bien précises : inefficacité du traitement médical, survenue d’une complication par exemple. Dans la maladie de Crohn, l’intervention qui consiste à enlever un segment intestinal est suivie d’une amélioration de la symptomatologie. L’efficacité du traitement médical dans la rectocolite rend encore plus rares les indications opératoires chez l’enfant.
La vie quotidienne des jeunes malades
Expliquer sa maladie à l’enfant
Être atteint d’une MICI n’est pas une situation simple pour un enfant et pour ses parents. Celui-ci est non seulement incommodé par les symptômes de sa maladie, mais il doit également se soumettre à des investigations et à un traitement parfois contraignant. Il vaut mieux, dans la mesure du possible et en fonction de son âge et de sa compréhension, expliquer à l’enfant sa maladie. Toute la difficulté pour l’entourage est de le soutenir sans le couver, de l’informer sans l’inquiéter et de répondre le plus simplement et clairement possible à ses questions.
L’organisation de la vie quotidienne
L’enfant doit mener dans la mesure du possible une vie normale. Il faudra pour cela trouver un juste équilibre entre une surveillance rigoureuse de la maladie, un aménagement des conditions de vie, et l’intégration du jeune patient aux autres enfants de son âge.
La fréquentation scolaire doit être normale en dehors des périodes de poussées évolutives. En cas de poussée peu importante ou stabilisée par le traitement, l’enfant est souvent le meilleur juge pour savoir s’il peut ou non aller à l’école ou suivre telle ou telle activité.
La pratique du sport est autorisée. L’intensité de l’activité physique doit être modulée en fonction de l’état général de l’enfant.
Faut-il révéler le diagnostic à l’enseignant ?
La question peut se poser de révéler ou pas le diagnostic de la maladie à l’entourage scolaire de l’enfant. Il faut ici tenir compte de l’avis du jeune patient. Il est clair que mettre dans la confidence l’enseignant peut faciliter la vie de l’enfant, notamment être autorisé à aller aux toilettes pendant les cours, et pour expliquer ses absences.
Une alimentation normale en dehors des poussées
En dehors des poussées évolutives de la maladie, l’alimentation doit être identique à celle des autres enfants du même âge en limitant toutefois la consommation de certains aliments. Pendant les poussées de la maladie, il est utile de soumettre l’enfant à un régime pauvre en fibres avec une ration énergétique suffisante.
Si l’enfant ne parvient pas à se nourrir, ou si l’apport calorique est insuffisant, il est nécessaire de recourir à une alimentation par sonde ou en perfusion.
Les MICI de l’enfant relèvent d’une prise en charge globale qui doit être réalisée au mieux en milieu pédiatrique afin de profiter de l’expertise des personnels soignants en terme de prise en charge de l’enfant malade (scolarité, puberté, socialisation des adolescents entre eux, passage à l’âge adulte …).
À savoir chez l’enfant
Les MICI pédiatriques (en particulier la MC) sont volontiers associées à un retard de croissance, une malnutrition et un retard pubertaire.
Les MICI de l’enfant sont plus étendues et ont une activité plus importante par comparaison aux MICI de l’adulte. Les lésions ont une forte tendance à l’extension au cours des premières années.
La nutrition entérale est un élément majeur du traitement de la MC pédiatrique.
Une taille fnale normale est un objectif important de la prise en charge.
LES COMORBIDITES
Une comorbidité est une condition médicale supplémentaire qui vient s’ajouter à une MICI diagnostiquée. Les affections comorbides peuvent être liées au processus de la maladie, à son traitement ou à son indépendance. Ils peuvent contribuer au fardeau de la maladie, au pronostic, à la morbidité et peuvent affecter votre qualité de vie.
Comme vous le savez, les MICI sont un groupe de maladies inflammatoires à médiation immunitaire qui affectent une partie ou l’intégralité du tube digestif, ainsi que d’autres organes du système digestif, l’appareil locomoteur, la peau, les yeux, les poumons et le cœur. Les patients atteints de MICI courent un risque accru de développer certaines comorbidités, ce qui peut avoir un impact négatif sur les résultats en matière de santé, la qualité de vie, les coûts des soins de santé et augmenter le fardeau des patients. Les patients souffrent généralement de fatigue chronique, de douleur chronique, de problèmes de sommeil et de problèmes de santé mentale, y compris la dépression et l’anxiété. Il est important que les patients soient informés et prévenus des comorbidités courantes qu’ils peuvent rencontrer ayant une MICI et de l’importance d’un diagnostic ainsi que d’une prise en charge précoce. En plus des connaissances, il est important de veiller à ce que votre médecin de famille, votre gastroentérologue et votre pharmacien soient tenus au courant des diverses autres maladies diagnostiquées dont vous souffrez, et du traitement que vous prenez. Ceci est important car votre gastroentérologue ne sera probablement pas le seul médecin à gérer vos soins.
Manifestations extra intestinales | Complications extra intestinales |
---|---|
Maladies musculo-articulaires : 20 à 30 % • Arthrites périphériques • Spondylarthrite ankylosante • Sacro-iliite isolée |
• Médicaments induisant une ostéoporose et une ostéonécrose (corticoïdes, ...) • Infection bactérienne des articulations • Arthrite septique • Ostéomalacie (carence en vit. D, résection grêle) |
Mal dies cutanées • Erythème noueux (15 %) • Pyoderma gangrenosum (< 2 %) • Aphtose ou ulcération orale (10 à 30 %) • Psoriasis • Sweet syndrome • Epidermolyse bulleuse • Fissures anales • Fistules |
• Acrodermite entéropathique (carence en zinc) • Purpura (carence en zinc et Vitamine C) • Glossite (carence en vitamine B et zinc) • Perte de cheveux (carence en fer et protéines) • Perlèche (carence en fer) • Candidose (carence en zinc et immunosuppression) • Stomatite (methotrexate) • Rash, allergie induite par les médicaments • Acnée, atrophie cutanée (corticoïde) |
Maladies oculaires • Uvéite antérieure (< 3 %) • Conjonctivite • Episclérite |
• Kératopathie (carence en vit. A) • Diminution de la vision nocturne (carence en vitamine A) • Infections opportunistes (immunosuppression) • Cataracte (corticoïdes) |
Maladies hépato-biliaires • Cholangite sclérosante primitive (<3 %) • Hépatite granulomateuse de Crohn • Hépatite chronique auto-immune • Cirrhose biliaire |
• Calcul biliaire • Stéatose hépatique |
Maladies vasculaire et sanguine • Thrombose • Anémie hémolytique auto immune • Purpura thrombocytopénique (Moschcowitz syndrome) |
• Anémie (carence en fer, folate, vitamine B12) • Thrombocytose • Hyperleucocytose • Hypercoagulation : thrombose périphérique et profonde |
Maladies rénales • Protéinurie tubulaire • Glomérulonéphrite • Néphrite interstitielle |
• Lithiase urinaire (oxalate, acide urique) • Infection locale urétro-génitale • Néphrite aiguë interstitielle (5 ASA) • Insuffisance rénale induite secondaire (5 ASA, ciclosporine) • Amylose rénale |
Maladies broncho-pulmonaires • Bronchite chronique, bronchectasie • BOOP, pneumopathie interstitielle • Laryngo-trachéite aiguë • Sténose trachéale • Pleurésies séreuses |
• Pneumopathie médicamenteuse (MTX, 5 ASA) • Fibrose pulmonaire médicamenteuse (MTX) • Pleurésie induite par les médicaments • Infections opportunistes (IS) |
Maladies cardiaques • Péricardite • Myocardite |
• Péricardite médicamenteuse (5 ASA) |
Maladies neurologiques • Maladie démyélinisante • Névrite optique |
• Neuropathie périphérique (carence en B12) • Leuco-encéphalite induite (IFX, natalizumab) • Polynévrite (métronidazole) |